18.6.06

La petite robe de Paul, de Philippe Grimbert

On ne sait pas toujours pourquoi on achète un livre. Celui-ci, je crois que je l'avais inscrit sur une liste de cadeaux à la suite d'une chronique entendue sur France Inter ou France Infos, et c'est ma mère qui me l'a offert. Je ne sais pas non plus pourquoi, alors qu'il dort dans ma bibliothèque depuis bientôt deux ans, j'ai ressenti maintenant l'impérieuse nécessité de le lire. Pour rester dans les robes, sans doute, dans ces robes d'hommes qui nous dévoilent des abîmes... Et je l'ai dévoré d'une traite.
Philippe Grimbert est psychanalyste, je viens de le vérifier sur le net, et ça ne m'étonne pas. Son écriture est simple, sans fioriture, efficace. Terriblement efficace.
A partir d'une anecdote un peu étrange, bien que très ancrée dans un quotidien banal, La petite robe de Paul nous entraîne dans la vie intérieure d'un couple, dans les secrets de famille, les deuils mal cicatrisés, le mystère jamais tout à fait dévoilé des êtres avec lesquels on vit pourtant au quotidien. La construction parfaite du récit permet de suivre le cheminement conscient et insconscient de Paul et d'Irène, alors qu'une simple robe d'enfant leur impose en quelque sorte de faire le point, séparément puis ensemble, sur les blessures passées qui les empêchent de poursuivre leur route, de s'accomplir en tant qu'individus et en tant que couple, de se libérer de ce qui fut trop douloureux, en commençant par accepter que ce le fut.
Forcément, cette histoire qui recoupe certains pans de la mienne réveille mes démons et mes questions. Mais même sans cela, l'écriture est suffisamment puissante pour nous plonger de manière très directe dans la pensée des personnages, et nous faire ressentir intensément ce qu'ils traversent. Chaque individu a ses secrets, même celui qui semble le plus banal et dont la vie semble s'être écoulée sans heurts. Mais la souffrance sans doute est nécessaire à la construction de l'être, ce que nous dit aussi différemment le récit de Robert Alexis, avec le questionnement sur l'ambiguïté des sentiments et des pulsions, les hasards qui n'en sont pas, les rencontres qui changent notre vision des choses... Reste ensuite à trouver des réponses, et au-delà peut-être, au moins un être entre les mains de qui remettre nos lourds secrets, avouer nos peines, dire vraiment ce que certaines épreuves ont remué au fond de nous, pour qu'enfin la glue du passé cesse de plomber nos semelles... C'est là me semble-t-il le message du roman de Philippe Grimbert. Un message de psychanalyste évidemment. Mais aussi un message de bon sens.

Les critiques du livre sont plutôt bonnes, notamment dans Lire, qui salue le premier roman du psychanalyste. Mais les lecteurs à mon avis s'empêtrent parfois dans leur interprétation du roman... Je ne suis pas d'accord avec Clarabel sur le Club des Rats de Biblio.net lorsqu'elle évoque la description d'un couple trop parfait et donc énervante, ni avec Paula sur Critiques Ordinaires, lorsqu'elle dit que Paul n'a pas trop souffert de la fausse couche de sa femme (à mon avis, c'est tout le contraire qui est révélé par la petite robe blanche...), encore moins avec Marie-Ange sur Lisons.info lorsqu'elle parle d'un couple superficiellement uni dont la trame va s'user jusqu'à la corde. Les remarques de Pierre Bachy me semblent un peu plus fondées même si je trouve leur formulation embrouillée, et A travers les livres, plus concis dit finalement les choses plus justement.
On peut en savoir un peu plus sur Philippe Grimbert dans un court article de Wikipedia, et lire les premières pages du livre sur le site de son éditeur, Grasset.

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