Anne, Emily et Charlotte Brontë. Au centre, l'ombre de Branwell Brontë, leur frère et auteur de l'aquarelle. |
Je me suis replongée dans les œuvres des sœurs Brontë, que j'avais lues adolescente, mais dont je ne conservais pas un souvenir précis. Je me souvenais avoir bien aimé Les Hauts de Hurlevent, d'Emily Brontë, et je maintiens mon appréciation positive, en restant dubitative sur le fait qu'on mette de telles lectures entre les mains d'adolescentes, et stupéfaite qu'une jeune femme comme Emily Brontë, qui selon ses biographes n'avait pas une grande connaissance du monde, ait pu concevoir des personnages aussi frappants, et aussi originaux.
L'histoire se passe dans un hameau retiré, autour d'une demi-douzaine de personnages du même cercle familial. Heathcliff, recueilli enfant par Monsieur Earnshaw, commence par faire "le diable à quatre" avec Catherine, fille du maître de maison. Cette relation enfantine déjà marquée par une certaine perversité, une cruauté cependant assez banale qui la plupart du temps s'estompe à l'âge adulte, va ici se transformer en une relation passionnelle et manipulatrice. Heathcliff n'aura de cesse, sa vie durant, non seulement d'obtenir l'amour de Catherine, qui a épousé Edgar Linton, fils d'un magistrat voisin, mais surtout de se venger de la famille Earnshaw toute entière, du frère de Catherine qui l'a méprisé, et de toute la descendance de son père adoptif. Intelligent, cynique, manipulateur et cruel, il parviendra à s'approprier tous les biens de la famille, et à réduire la plupart de ses membres à la dépendance matérielle, mais aussi psychologique. Les petits enfants de l'homme compatissant qui l'avait recueilli parviendront-ils à se dégager de la terrible emprise d'Heathcliff ? Relisez le roman pour le savoir : Les Hauts de Hurlevent conserve tout son intérêt et son originalité. C'est un vrai drame psychologique, où toutes les facettes de l'âme humaine sont analysées avec une grande acuité, et qui fait encore frémir...
L'œuvre de Charlotte, Jane Eyre, fait pâle figure en regard de la puissance de l'unique roman d'Emily. Non que les péripéties de la jeune orpheline, qui quitte la maison de son oncle décédé pour entrer dans un orphelinat avant de voler de ses propres ailes, soient banales ou inintéressantes. La réflexion de départ sur les conséquences du manque d'amour sur le caractère des jeunes enfants est même assez pertinente, et la personnalité de Jane est plutôt attachante et originale. Mais, au contraire de sa sœur Emily qui se fiche bien des conventions sociales et religieuses, pourtant prégnantes à l'époque, Charlotte semble avoir voulu faire de son roman une "édification", emplie de digressions morales et métaphysiques qui donnent au roman un caractère vieilli et parfois irritant.
Grand merci à René Depasse pour sa lecture des Hauts de Hurlevent, et à Chantal Magnat pour celle de Jane Eyre, toutes deux téléchargeables sur Litterature audio.com.
A signaler : l'introduction de la traduction française des Hauts de Hurlevent est intéressante, et renseigne sur la biographie d'Emily Brontë.
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